Céline : "J'ai passé 20 ans à me sentir mal, à espérer grossir"

"Les gens ont commencé très tôt à me faire des remarques. En primaire, mes camarades m'appelaient "Squeletor", "fil de fer", "sac d'os". Au collège et au lycée, idem : "Elle passe derrière les affiches sans les décoller" ou "Tu mets un briquet derrière et ça fait une radio". Je le vivais très mal. Encore aujourd'hui, en écrivant ceci, je ne me sens pas très bien. On a l'impression que les enfants cherchent toujours le point faible chez les autres : les gros, les maigres, les grands nez, les roux, etc."

Ne pas grossir, une chance

"À partir du lycée, ça a été un peu mieux (un peu !) et à la fac, il y a eu un retournement de situation. Les gens ont commencé à me dire que j'avais de la chance de ne pas grossir, que j'étais mince (et plus maigre, c'est un pas de géant). Aujourd'hui, on me dit que je suis trop mince mais ce n'est plus la même chose. Je pense qu'on me voit toujours de la même manière mais les adultes ne font pas ce que font les enfants : énoncer des vérités sans penser à la personne qui les reçoit. Les gens passent quand même leur temps à me dire "Mange !", ce qui me met à chaque fois hors de moi."

"J'ai passé 20 ans à me sentir mal, à espérer grossir… pour finalement me dire que ça suffisait, que j'en avais assez. Aujourd'hui, je m'accepte, je me trouve bien. J'aimerais toujours prendre des bras, des hanches et des mollets mais ce n'est pas un drame si ça ne vient pas. Je me dis que si vraiment je le vivais mal à un moment, je me mettrais au sport pour me muscler. Et puis maintenant tellement de filles me disent que j'ai de la chance, que j'ai la taille mannequin et tout ça en ne me privant pas, que je me dis que c'est vrai."

Une question de morphologie

"Je ne fais rien de spécial pour prendre du poids. J'ai pris l'habitude de manger énormément, souvent et n'importe quoi. Je petit-déjeune de la brioche à 6h30, un croissant à 9h, des gâteaux ou une barre chocolatée à 11h30. Un repas, un plat préparé ou des pâtes à 14h30 avec fromage, dessert, puis des gâteaux, des glaces, des bonbons au chocolat tout au long de l'après-midi. J'adore cuisiner et je fais généralement des plats en sauce, des pâtes à la bolognaise, de la purée... Je cuisine tout au beurre et rien chez moi n'est allégé. Si je me mettais à grossir maintenant, je ne pourrais jamais arrêter de manger autant et je deviendrais énorme. J'ai une anecdote. À la fac, j'étais en cité universitaire. Pendant des vacances avec une amie, nous avons passé une semaine entière chez moi à regarder la télé, à rigoler et à manger. À la fin de la semaine, elle avait pris 3,5 kilos. Elle a arrêté le régime Céline après cela…"

"Je ne me rappelle pas avoir vu de spécialiste puisque mes parents, certaines de mes tantes, l'une de mes sœurs et mon frère sont comme moi. J'avais l'habitude de demander aux médecins s'ils trouvaient ça normal, si je n'avais pas un ver solitaire… mais ils m'ont toujours dit que c'était de famille, que j'étais comme ça et c'est tout. Si j'ai voulu témoigner c'est pour que les gens comprennent qu'une fille maigre n'est pas forcément anorexique et qu'ils arrêtent de faire des remarques, c'est très blessant. Cela m'a au moins appris la tolérance. Je ne supporte pas qu'on fasse des remarques sur le physique de quelqu'un. Il y a des choses qu'on ne peut pas changer et on les vit assez mal sans que tout le monde soit obligé de nous les rappeler à longueur de temps."

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