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Interview
 
09/02/2008

Sarah Serievic : "A force d'endosser les rôles que l'on nous donne, on finit par se prendre au jeu."

Psychothérapeute et auteur du livre "Rompre avec nos rôles", Sarah Serievic a repondu à vos questions lors d'un chat en direct sur le thème de l'affirmation de soi.
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La plupart du temps, il est très difficile de faire la différence entre l'image qu'on a l'impression de donner, et ce que l'on "dégage" réellement. Pouvez-vous nous aider à faire la part des choses afin d'être moins prisonnier de nos préjugés ?

On a du mal à accepter d'être pleinement qui l'on est, parce que, très tôt, nous avons été amenés à jouer des rôles. Ces rôles-là nous ont été distribués très tôt dans notre enfance. Et la meilleure façon de se faire aimer a été de répondre à ces rôles, d'être conforme à ce qu'on attendait de nous. D'où le fameux décalage entre ce que l'on montre et ce que l'on est. A force d'endosser ce rôle, on a fini par se prendre au jeu. Il y a là une perte d'identité.

Quelle est votre définition personnelle de "être soi" ?

Etre soi... c'est être en cohérence avec ce que l'on sent à l'intérieur et ce que l'on transmet de soi-même. C'est cette autorisation que l'on se donne d'oser transgresser les règles qui ne sont pas en accord avec qui nous sommes. Et de le faire dans le respect de qui l'on est, et dans le respect des autres.

 

 
Sarah Sérievic © L'Internaute magazine/Cécile Genest
 

"Vous avez le droit d'aimer votre mère en étant différente de votre mère. Vous avez le droit et le devoir d'être qui vous êtes.

Ma mère a toujours rêvé d'être architecte. Je me suis moi-même orientée vers cette profession mais je me rends compte que je ne suis pas épanouie. Que faire ?

Vous avez le droit d'aimer votre mère en étant différente de votre mère. Vous avez le droit et le devoir d'être qui vous êtes. Ne serait-ce que pour honorer la vie qu'elle vous a donnée. C'est le plus bel hommage que vous pouvez porter à votre mère : réaliser pleinement cette vie qui vous a été donnée à travers elle et en faire votre œuvre. Si vous le faites profondément en accord avec vous, vous inviterez aussi votre mère à être qui elle est, en dehors de son statut social.

La timidité, les peurs, le regard de l'autre m'empêchent souvent d'être ce que je suis et m'inhibent alors que j'aurais tant à dire. Comment faire pour avancer ?

La timidité est un masque qui contient ses bénéfices. Demandez-vous d'abord ce que vous avez tellement besoin d'exprimer. Et quels sont les enjeux qui vous coupent de cette expression de vous. Quels sont les bénéfices à rester silencieuse ? Peut-être que cela vaudrait le coup de tenter le risque de l'erreur pour constater que finalement ce n'est pas si grave.

Pensez-vous que le théâtre puisse me permettre de me libérer ?

Tout dépend... Si vous êtes bien claire avec les émotions qui vous sont douloureuses et avec l'histoire de ces émotions, alors cela peut être intéressant d'aller les jouer. Si vous n'êtes pas claire avec vos émotions, et que vous enfilez un costume qui peut réveiller des douleurs inconscientes, alors vous pouvez vous faire très mal. C'est la raison pour laquelle j'ai créé mon théâtre authentique. C'est un espace rassurant où l'on va jouer nos émotions tout en sachant vraiment ce que l'on exprime.

Qu'est-ce que ce fameux "théâtre authentique" ?

C'est un espace de liberté, où on va oser prendre le risque d'être soi-même. C'est l'occasion de vivre tout le kaléidoscope émotionnel. On va s'apercevoir que tout peut se dire, tout peut se vivre, à condition d'avoir un regard bien veillant sur soi-même. On va mettre en scène nos situations de vie douloureuses ou inachevées afin de trouver une réponse nouvelle à nos comportements anciens. En clair, l'objectif est sortir des comportements stéréotypés qui nous coupent de notre élan vivant.

Est-il normal de ne pas aimer dire non ?

Bien sûr, il est souvent plus agréable d'être conforme aux attentes de ceux que nous voulons séduire. Mais la question qui s'impose c'est : "êtes-vous pour ou contre vous ?" Si vous n'êtes pas capable de dire non, votre oui est-il vraiment sincère ?

 
Sarah Sérievic © L'Internaute magazine/Cécile Genest
 
"Donnez la parole à votre talent plutôt qu'à votre performance."

Lorsque j'ai un entretien, je perds mes moyens. Pareil pour une audition en danse contemporaine : j'aurais eu plein de choses à improviser si je ne m'étais pas mis des freins. Que faire pour que le déclic se fasse ?

Retrouvez le sens du plaisir, surtout si vous dansez. C'est une telle chance de vivre de son art. Alors vivez le pleinement pour votre propre plaisir. Si vous aimez vraiment ce que vous faites, même en faisant des erreurs au niveau de votre technique, votre jury sera sensible à ce qui émane de vous dans cet instant. Et c'est l'élan du cœur qui va l'emporter.

On dit souvent que l'on reproduit le schéma familial que nos parents nous ont inculqué. Est-ce vrai ?

Oui, bien sûr que c'est vrai. C'est une loyauté familiale, qui nous fait agir malgré nous. Quand l'entente avec les parents est harmonieuse, il y a un désir conscient, ou inconscient, de répéter leur histoire. Mais, si on est en conflit avec eux, la façon inconsciente de continuer à les aimer, c'est de répéter leur scénario. Ou alors, le même scénario à l'envers, ce qui est une autre façon de ne pas choisir notre propre destin.

Comment ne pas reproduire ce schéma familial ?

En clarifiant nos propres besoins. Par exemple : si dans une famille il est de bon ton de ne pas vivre sa sexualité parce que dans les générations précédentes, il y a eu un enfant illégitime, il arrive souvent que les descendants payent la dette de l'aïeul. Le fait simplement de vivre une véritable histoire d'amour peut réveiller la culpabilité. Il y a beaucoup de personnes qui préfèrent rompre avec une histoire d'amour plutôt que de prendre le risque de s'autoriser le plaisir dans la relation. Il y a comme un sentiment de trahison par rapport aux parents que nous avons vu souffrir. Alors, comment sortir de ce schéma ? En réintégrant la connexion entre nos sentiments, nos sensations, et nos croyances.

Dans la vie professionnelle, nous ne sommes souvent jugés que sur la performance, comment échapper à cette pression permanente et rester soi?

En donnant la parole à votre talent plutôt qu'à votre performance. L'état d'esprit dans lequel vous travaillez est plus important que vos productions.

 
Sarah Sérievic © L'Internaute magazine/Cécile Genest
 

"Demandez-vous ce qui vous fait vraiment plaisir. Qu'est-ce qui vous dynamise ?"

Que vous a apporté l'écriture de votre livre ?

Dans mon théâtre authentique, je ne cesse de m'émerveiller des changements quasi-miraculeux qui s'opèrent sous mes yeux et quelquefois cela me fait peur. J'ai comme l'impression que cela n'est pas reproductible dans la durée. Et de mettre en mots la façon dont nous pouvons sortir de nos comportements réactionnels m'a permis de structurer les choses et comprendre qu'il y a un sens à tout cela. Ce n'est pas de la magie, c'est vraiment la résultante d'un engagement. J'ai voulu faire savoir qu'il n'y a pas de pouvoir plus puissant que soi-même sur soi-même.

Après avoir été sous l'emprise d'un pervers manipulateur, comment faire pour être à nouveau soi ?

Vous pardonner. Vous n'êtes pas allée dans cette histoire par hasard. Essayez de comprendre quelle est la part de vous qui a attiré cela. Et surtout ne vous jugez pas. Vous aviez peut-être besoin de passer par cette phase pour apprendre à vous aimer. Un travail thérapeutique pourrait peut-être vous aider à sortir de la souffrance.

Comment savoir quelle est ma vraie personnalité ?

Demandez-vous ce qui vous fait vraiment plaisir. Qu'est-ce que vous dynamise ? Qu'est-ce que vous sentez quand vous entrez en relation avec quelqu'un ? Demandez-vous si ce que vous dites ou ce que vous faites est vraiment en accord avec votre expression. Et s'il y a un décalage, quelles sont les croyances qui vous font agir à contre-courant de vous-même ?

Quel serait votre dernier conseil pour apprendre à être soi ?

Vous êtes nés pour exprimer la vie qui passe à travers vous. C'est un cadeau magnifique et il est souvent trop tard quand on en a conscience. J'ai moi-même été gravement malade à l'âge de 17 ans. J'ai connu la paralysie. Et cette conscience de la vie qui bat dans mes entrailles est un émerveillement au quotidien. Il n'y a pas d'autre mort que ce qui nous retient de vivre.


"Rompre avec nos rôles. Eloge d'être soi"
Sarah Sérievic
Editions Le Souffle D'or

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A lire aussi : "Comment dire non : le guide pour s'affirmer"





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