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DHEA : où en est-on ?  

Les effets controversés de la DHEA en ont fait une des hormones les plus médiatisées. Aujourd'hui, c'est le silence radio : pourtant les recherches continuent, l'hormone est toujours autant 'gobée' outre-Atlantique et pas moins interdite en France... Le Journal des Femmes fait le point. (4 septembre 2003)

La DHEA, qu'est-ce que c'est exactement ?
Abréviation de la déhydroépiandrostérone, la DHEA est une hormone produite à partir de l'âge de 6 ans pour atteindre son maximum vers la trentaine, la "fleur de l'âge" dit-on... À 70 ans, nous n'en fabriquons quasiment plus. L'amélioration constatée de certains paramètres en ont fait la pilule miracle anti-vieillissement... C'est le professeur français Etienne-Emile Baulieu qui a découvert en 1960 que cette hormone était sécrétée par les glandes corticosurrénales (situées au-dessus des reins). L'organisme utilise cette DHEA pour fabriquer les hormones sexuelles : les androgènes, hormones mâles, ou les oestrogènes, hormones femelles. Les effets bénéfiques observés suite à la prise de DHEA seraient donc peut-être liés à l'augmentation du taux de ces hormones, mais rien n'est sûr.

Une action anti-vieillissement montrée...
La DHEA possèderait une action anti-vieillissement : amélioration de l'état de la peau, des os et de la libido chez les personnes âgées. Ces effets sont bien sûr à l'origine de sa célébrité. Seul problème, la découverte de ces propriétés "miraculeuses" est récente et suscite encore beaucoup d'interrogations. C'est en effet depuis moins de dix ans (en 94) que des chercheurs ont publié les premiers résultats confirmant que la DHEA possédait une action anti-vieillissement. L'administration de la DHEA à des patients d'âge mur entraînait, selon les résultats de cette étude, des changements biologiques, physiques, et psychologiques... Tous bénéfiques bien sûr. La FDA (Food and drug administration), équivalent américain de notre Afssaps (Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé) ne perd alors pas une seconde pour l'autoriser aux États-Unis, en la considérant comme un complément alimentaire.

En 1996, au Québec, un autre chercheur découvre que la DHEA entraîne aussi une augmentation sensible de la densité osseuse des sujets traités. L'impact de la DHEA dans la lutte contre l'ostéoporose est signalé. Enfin, d'autres observations ont établi que la prise de DHEA réduirait aussi les facteurs de risque cardiovasculaire.

... mais des effets à long termes inconnus
La DHEA présente néanmoins des contre-indications non négligeables (par exemple pour les femmes présentant un cancer du sein, celles de moins de 35 ans, celles qui présentent une insuffisance rénale...) et des effets secondaires : augmentation de la pilosité (c'est une hormone rappelons-le), insomnie, accélération du rythme cardiaque etc...
Sa consommation favoriserait aussi l'apparition de cancers hormono-dépendants (cancer du sein ou de l'utérus, cancer de la prostate, cancer du rein). Il s'agit bien sûr d'un risque à long terme : un risque actuellement mal connu et non maîtrisé. Du fait de sa récente découverte, les effets bénéfiques montrés chez certains patients sur un an n'ont pas pu être prouvés par des études plus longues.

Où en est la recherche ?
Les résultats des deux dernières études ont été publiés en 2000 et 2001. En avril 2000, le professeur Baulieu publie une étude nommée "dheâge", dans laquelle 280 volontaires de plus de 60 ans ont pris de la DHEA chaque jour pendant un an. Les résultats sont positifs, concernant les femmes en tout cas. En juin 2001, une revue américaine publie les résultats d'une étude ("Paquid"), menée sur 290 personnes âgées, suivies pendant 8 ans. Selon ces résultats, la DHEA augmenterait l'espérance de vie de certains individus... Depuis, aucune étude significative n'est sortie.
La DHEA sera-t-elle l'hormone du XXIème siècle ? Il faudra encore attendre vraisemblablement 5 ou 10 ans pour le savoir...

Le vide juridique français
En novembre 2000, les instances sanitaires autorisent la vente de la DHEA en France. Cependant la DHEA n'a toujours pas d'Autorisation de Mise sur le Marché (AMM) en France, ce qui signifie qu'elle n'est pas reconnue comme médicament. Ce vide juridique aidant, elle peut être vendue en pharmacie sous forme de préparations magistrales (les pharmaciens n'ont pas le droit de l'importer sous forme de comprimés), c'est-à-dire sous forme de DHEA élaborée artisanalement dans les officines, à partir de la poudre fournie par les distributeurs. Cette poudre vient de plantes (racine de l'igname sauvage en particulier) qui poussent dans les régions chaudes.

Un business Internet
Une simple recherche Google avec le mot clé "DHEA" (en France) et on obtient en deuxième position un site qui propose l'hormone à la vente sans parler d'une dizaine de liens publicitaires... La DHEA et Internet : l'équipe gagnante du business ne serait-elle pas une véritable escroquerie dans la réalité ?
Le risque de fraude est en effet important quand vous achetez ce type de produit sur le net. Pourquoi ? Car certains escrocs profitent de ce créneau juteux pour vous vendre tout simplement de la farine à la place de l'hormone miraculeuse. C'est ce qu'a confirmé un test réalisé par le Professeur Baulieu en personne. Il a analysé le contenu de boîtes de DHEA en provenance des États-Unis, vendus sur le net. Résultat sans appel : des écarts entre la quantité annoncée et la quantité réellement présente dans les comprimés ont été constatés. Et parfois même, l'absence totale de l'hormone dans les fameux comprimés.

Comme tout produit susceptible d'avoir des effets sur la santé dont on ignore encore s'ils sont réellement bénéfiques et sans danger, et compte-tenu des recommandations sanitaires de notre pays, nous ne saurions vous conseiller de vous fournir sur le net, ni ailleurs du reste !

Diane Mottez

En savoir plus
- Position de l'Affsaps (mai 2001)
L'Afssaps attire l'attention des consommateurs potentiels de DHEA sur le fait qu'elle ne dispose pas de données scientifiques suffisantes lui permettant de déterminer avec exactitude les propriétés pharmacologiques, toxicologiques et cliniques de cette substance.

- Position de l'ordre des médecins (avril et juillet 2001)
Rien n'est encore défini concernant la posologie adéquate : la durée du traitement, les indications et contre-indications, les effets secondaires, et les risques consécutifs à son absorption. Il est donc pour l'instant conseillé au médecin de ne pas répondre favorablement à la demande d'un patient, dans l'intérêt de celui-ci, et en raison de la responsabilité engagée du médecin prescripteur en cas d'incident même allégué, ou de poursuite, d'autant que les obligations légales de la pharmacovigilance doivent être observées et que la prescription médicale ne peut de ce fait rester clandestine. (avril 2001)

"L'Ordre National des Médecins recommande à nouveau aux consommateurs éventuels de la D.H.E.A., d'être prudents et aux médecins de ne pas répondre favorablement aux sollicitations de ces demandeurs (...) Il souhaite que des études scientifiques de qualité permettent dans les meilleurs délais de lever les incertitudes actuelles." (juillet 2001)

- Arrêté du 2 février 2000 : Le Ministère de la Jeunesse et des Sports a interdit la DHEA, en tant que substance dopante.

- Un site : www.dhea.fr

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