Entretien avec le Pr Charpentier "Il faut que la société prenne conscience que grâce aux dons, des gens vivent"

Comment augmenter les dons ?

 Il faut d'abord une forte volonté politique du pays comme en Espagne par exemple. Il faut que les politiques en fassent un vrai enjeu de santé publique, que toute la population connaisse et comprenne l'importance du don d'organe.

 Il est important ensuite qu'il y ait une vraie poussée sociétale, que toute la société se mobilise, la transplantation est un effort à faire. Il faut que la société prenne conscience que grâce aux dons, des gens vivent. "Les autres pourraient vivre grâce à vous".

"Il faut démythifier le don."

 Il faut une amélioration des circuits médicaux : trouver l'ensemble des 1% prélevables et les optimiser. Pour ça, les coordinations médicales doivent être augmentées dans notre pays.

 A l'échelon individuel, il est important que tous les médias expliquent qu'il faut démythifier le don. Quand on est mort, on est mort. Et les respirateurs qui maintiennent le corps chaud ne changeront pas l'état de mort cérébrale. On ne tue pas en prélevant les organes, le cerveau est déjà mort.

"C'est donc un effort collectif, de solidarité, qui doit être pris pour maintenir l'humanité."

 Si on revient aux premiers hommes, quelle a été la plus grande marque de rassemblement entre tous les hommes ? La volonté de survivre et de lutter contre la mort ! Fondamentalement, l'Homme lutte contre la mort et quelque part retransmettre la vie à travers sa mort est une façon de lutter contre la mort, par amour de l'humanité, c'est d'ailleurs ce qui a sauvé l'humanité.

 En Espagne, ils atteignent 35 à 40 prélèvements par an par millions d'habitants, pourquoi ? Parce qu'il n'y a pratiquement pas de refus familial. La poussée sociétale entraîne les gens à accepter le don. En France, dans les années 70, le refus familial représentait 5 %, aujourd'hui il est de 30 à 40 % !

Quels sont vos rêves absolus sur ce sujet ?

 D'abord qu'il n'y ait plus de maladies entraînant des défaillances des organes, comme ça les greffes seraient inutiles. Mais pour ça il faut de la prévention, sur les risques de l'alcool par exemple, se faire vacciner contre l'Hépatite B, peut-être un jour contre l'Hépatite C...

"En France on décompte 8 % de dons venant de donneurs vivants, aux Etats-Unis 50 % !"

 Ensuite, il faut savoir qu'aujourd'hui on en est à la médecine de remplacement avec les greffes, c'est une étape de la médecine, mais surtout pas une victoire. La victoire serait la médecine régénérative qui pourrait faire disparaître la médecine de remplacement. Mais les régénérations ne sont pas encore d'actualité.

Il faut aussi optimiser les prélèvements et les dons que ce soit pour les donneurs apparentés ou cadavériques. En France on décompte 8 % de dons venant de donneurs vivants, aux Etats-Unis 50 % !

 Enfin, il faudrait que le refus familial redevienne, comme dans les années 70, une cause marginale de non transplantation .

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