Kiné, infirmiers : trop nombreux et mal répartis selon la Cour des Comptes

Ils sont dans le viseur de la Cour des Comptes, qui leur reproche d'alourdir "à un rythme soutenu" la facture des dépenses de l’Assurance maladie. Explications.

Kiné, infirmiers : trop nombreux et mal répartis selon la Cour des Comptes
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En 2014, la facture totale des dépenses d’assurance maladie concernant ces professionnels s’élève à 10,7 milliards d’euros, soit une augmentation annuelle moyenne de 6,5%, relève la Cour des Comptes, dans son rapport annuel sur la Sécurité sociale, publié mardi 15 septembre. En numéro 1 des dépenses, viennent les soins infirmiers (6,4 milliards) et les soins de kinésithérapie (3,6 milliards), qui totalisent donc environ 10 milliards d’euros à eux seuls, soit 93% du total des dépenses. La Cour note encore que le salaire moyen des infirmiers a particulièrement progressé : entre 2000 et 2013, il est ainsi passé de 30 517 à 52 022 euros.

Le vieillissement de la population n’explique pas tout. Certes, la population française vieillit et engendre indéniablement des besoins accrus de prise en charge de pathologies chroniques et de la dépendance. Et pour les prendre en charge, infirmiers et kinés sont en première ligne, notamment lors du maintien à domicile. Autre hypothèse pour expliquer l’augmentation des soins effectués par les infirmiers et kinésithérapeutes, le "virage ambulatoire", qui s’exprime par un transfert des soins de l’hôpital vers la ville. Pour autant, la Cour des Comptes estime que si ces évolutions des pratiques médicales jouent sans doute un rôle, il n’existe aucun document émanant du ministère de la Santé permettant de les mesurer objectivement. Selon elle, "l’augmentation de la population française, y compris de sa composante la plus âgée, n’explique en tout état de cause que très partiellement celle de l’activité des auxiliaires médicaux." Elle remarque par ailleurs, que si les soins infirmiers sont plus fréquents chez les personnes âgées, ceux de kinésithérapeutes interviennent en majorité (50%) chez des adultes encore actifs.

Trop d’infirmiers dans le Sud de la France. Selon la Cour des Comptes, il est impératif de réussir à concilier cette évolution avec les maîtrises des dépenses de l’assurance maladie, tout en conservant une prise en charge de qualité. Or, elle constate que les dépenses ont récemment augmenté à un "rythme soutenu", en raison de l’abondance de l’offre de soins et à une mauvaise répartition sur le territoire. Elle rappelle que les infirmiers et les kinésithérapeutes connaissent une croissance démographique forte (respectivement une hausse annuelle de 4% et 3,2%) en raison de l’augmentation continue de professionnels formés. De plus, ces professions sont très inégalement réparties sur le territoire. Par exemple, on trouve  seulement 75 infirmiers pour 100 000 habitants en Ile de France, contre 398 en Corse. Globalement, la Cour des Comptes remarque que pour ces deux professions, les inégalités régionales se sont notablement creusées, suggérant une régulation insuffisante de l’offre par l’Etat et l’Assurance maladie. Conséquence : les honoraires perçus par patient sont très supérieurs à la moyenne dans les régions les mieux dotées. Pour les infirmiers, ils approchent ou dépassent 800 € par patient et par an en Corse et en Provence-Alpes-Côte d’Azur (PACA), contre 159 € en Pays-de-la-Loire ou 166 € dans le Centre.

Evoquant une tendance à "l’emballement des dépenses", en l’absence de toute action de régulation, elle recommande donc la mise en place "sans délai" de mesures, visant notamment à renforcer les contrôles, à revoir la répartition territoriale de ces professions, ainsi que leurs modalités de rémunération. 

Densité des infirmiers et kinésithérapeutes exerçant en libéral
par département au 1er janvier 2014 © Cour des Comptes