3 questions au Pr Roman Rouzier, directeur médical du pôle sénologie à l'Institut Curie

Traiter à bon escient reste en 2014 la ligne de conduite tracée par le professeur Roman Rouzier, directeur médical du pôle sénologie de l'Institut Curie. Interview.

3 questions au Pr Roman Rouzier, directeur médical du pôle sénologie à l'Institut Curie
© Roman Rouzier / Institut Curie

Comment la survie des femmes atteintes de cancers du sein évolue-t-elle ? 

Ces 30 dernières années, l'Institut Curie a suivi environ 57000 femmes atteintes de cancers du sein. La survie à 5 ans après la découverte du cancer, qui était de 76,4 % au début des années 1980, s'est stabilisée autour de 90-94 % en 2005. Ces paliers sont contemporains de la mise en place du dépistage et de l'innovation thérapeutique. 

Sur-dépistages, sur-traitements : comment progresser ?

En tant que chirurgien et directeur du pôle sénologie, je suis particulièrement sensible au risque de sur-dépister et de sur-traiter. Ce risque existe avec le cancer intra-canalaire, la communauté scientifique en a conscience.
Suite au dépistage organisé, la proportion de cancers intra-canalaires a augmenté de 5 % à 20 % entre 1980 et aujourd'hui. Si leur pronostic est excellent, leur traitement est lourd de conséquences physiques et psychologiques. Peut-on et doit-on s'abstenir de les traiter ? L'attitude à adopter (intervention ou surveillance) doit être évaluée de façon scientifique.

En savoir plus sur le sur-dépistage et le sur-traitement 

Comment assurer l'accès à l'innovation dans les prochaines années ?
La plateforme de génétique moléculaire de l'Institut Curie se déploie progressivement. C'est l'une des trois plateformes mises en place par l'INCa en Île-de-France pour permettre à toute femme susceptible de bénéficier d'une thérapie ciblée d'y avoir accès. Les nouvelles techniques de séquençage à haut débit sont beaucoup plus rapides que les anciennes. Elles vont permettre de mieux caractériser les tumeurs et de favoriser l'accès à des thérapies ciblées adaptées à chaque tumeur.
Quant aux tests de signature moléculaire tumorale, qui permettent de prédire l'efficacité d'une chimiothérapie et d'éviter une chimiothérapie inutile, ils ne sont toujours pas remboursés et la France prend du retard par rapport à de nombreux pays.
Reste le problème du coût des traitements innovants. Des négociations sont en cours entre l'industrie pharmaceutique et les autorités sanitaires. Le traitement pourrait être délivré pendant trois mois à la patiente puis payé au laboratoire s'il fait preuve d'efficacité sur des critères préétablis.

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Crédit photo : Roman Rouzier / Institut Curie