Pilule et tabac : risques, effets secondaires, alternatives

A tout âge, la consommation de tabac associée à la prise d'une pilule œstro-progestative augmente les risques de maladies cardiovasculaires (AVC, thrombose, infarctus..). Quelles sont les pilules à éviter quand on fume ? Quelle contraception choisir à la place ? Explications du Pr Meneveau, cardiologue.

Pilule et tabac : risques, effets secondaires, alternatives
© belchonock - 123 RF

Selon la Fédération française de Cardiologie, les fumeurs, qu'ils soient réguliers ou très occasionnels (même une cigarette par jour !), ont presque deux fois plus de risques de subir des accidents cardiovasculaires que les non-fumeurs : +48% chez les hommes et +57% chez les femmes, Ces risques sont d'autant plus élevés en cas d'excès de cholestérol, de diabète, d'hypertension artérielle... Mais quel est le risque lorsque le tabac et associé à la prise d'une pilule chez la femme ? Quelle contraception choisir si on fume ? Explications du Professeur Nicolas Meneveau, cardiologue à Besançon.

Pilule et tabac : quels risques cardiovasculaires ?

Le risque d'infarctus est multiplié par 26 !

Fumer comporte des risques inhérents aux femmes utilisant une pilule œstro-progestative (dite "combinée") qui est formellement contre-indiquée chez les fumeuses. "Fumer (quel que soit son mode de consommation : cigarettes, cigarettes, narguilés...) lorsque l'on prend une pilule contraceptive est dangereux car cette association comporte un risque accru de complications cardiovasculaires, telles que : les thromboses, les accidents cardiaques ou cérébraux (AVC)", confirme le Pr Meneveau. L'expert explique : "en l'absence de facteurs de risques tels qu'un diabète, une hypertension artérielle, l'existence d'antécédents personnels cardiovasculaires, une obésité, un tabagisme ou une hypercholestérolémie, les accidents graves restent rares chez les femmes en âge de procréer. En revanche, en présence de facteurs de risques associés, la probabilité de présenter un événement cardiovasculaire va croître de manière très significative. A titre d'exemple, une femme tabagique sous pilule œstro-progestative a un risque d'infarctus du myocarde multiplié par 26". Il ajoute que "même si ce risque reste relativement faible en valeur absolue, la gravité des complications vasculaires rapportée aux millions de femmes qui reçoivent une contraception œstro-progestative en France, constitue un problème de santé publique potentiel dont il convient de tenir compte !"

→ A retenir : prendre une pilule oestro-progestative si on est fumeuse entraîne un risque accru de :

La Fédération française de Cardiologie assure qu'il n'est jamais trop tard pour arrêter de fumer : "en 15 jours seulement sans fumer, le risque de thrombose disparaît chez les moins de 30 ans, même après un accident cardiovasculaire et ils récupèrent l'intégralité de leur capital cardiovasculaire". Chez les personnes plus âgées, le fait d'arrêter de fumer reste toujours un bénéfice majeur.

Âge, cholestérol... Quels sont les facteurs de risque ?

"Chez les patientes prenant une pilule œstro-progestative, le risque veineux est multiplié par quatre, indépendamment du tabagisme. Chaque année, ce risque touche 0,5 femme sur 1000 - un taux qui augmente avec les pilules dites de 3et 4e génération. Le risque veineux est surtout élevé lors de la première année de la prise médicamenteuse" , indique notre interlocuteur. Elle est favorisé par d'autres facteurs :

  • l'âge (le risque est plus important après 40 ans),
  • les antécédents personnels d’événements vasculaires,
  • certains facteurs génétiques,
  • la grossesse,
  • les cancers
  • l'obésité,
  • la chirurgie,
  • la période du post-accouchement,
  • une immobilisation prolongée.

Dans ce contexte, un tabagisme isolé influe relativement peu sur le risque vasculaire veineux, en l'absence de contraception oestro-progestative.

 

Quelles sont les causes de ce sur-risque ?

"L'association tabac et hormones est délétère car elle induit des modifications biologiques qui favorisent la formation de caillots et génèrent des lésions de la paroi des vaisseaux sanguins". La dose d'œstrogènes constitue une part importante du risque vasculaire inhérent à la pilule. "Il y a une relation linéaire entre la dose d'œstrogènes et le risque vasculaire. Plus la dose d'œstrogènes composant la pilule œstro-progestative est élevée, plus le risque de complications vasculaires thrombotiques est important", explique le cardiologue. Aux premières pilules fortement dosées en œstrogènes ont succédé des formulations mini-dosées afin de réduire les risques d'accidents vasculaires cérébraux ou d'infarctus du myocarde. La nature du progestatif impacte également le risque de complications vasculaires veineuses, en particulier ceux utilisés dans les pilules de 3e et 4e génération.

Quelles sont les pilules à éviter ?

Les fumeuses doivent éviter les pilules contenant des œstrogènes. Voici la liste des pilules oestro-progestatives commercialisées en France : Adepal, Belara, Cilest, Effiprev, Harmonet, Jasmine, Jasminelle, Meliane, Melodia, Mercilon, Minesse, Minidril, Minulet, Moneva, Optidril, Optilova, Phaeva, Seasonique, Stediril, Triafemi, Tricilest, Triela, Triminulet, Trinordiol, Varnoline, Yaz, Zoely et leurs génériques.

Quelles sont les contraceptions alternatives ?

Une contraception œstro-progestative est formellement contre-indiquée pour une femme de plus de 35 ans

"Lors de la prescription d'un contraceptif, le médecin va s'informer, au cours de l'interrogatoire, de la présence éventuelle de facteurs de risques cardiovasculaires. En France, on considère qu'une contraception œstro-progestative est formellement contre-indiquée pour une femme de plus de 35 ans et qui fume plus de 15 cigarettes par jour. Une femme de moins de 35 ans peut envisager la prise d'une pilule combinée si elle n'a pas d'autres facteurs de risques cardiovasculaires", poursuit le Pr. Meneveau. Mais même si l'idéal est de réduire voire d'arrêter sa consommation de tabac, en cas de tabagisme intense, il est préférable d'avoir recours à une contraception progestative plus adaptée :

  • Pilule progestative micro-dosée (sans œstrogènes donc) : Cérazette® (et ses génériques Antigone®, Clareal Ge®, Desopiop®, Diamilla®), Microval® et Slinda®.
  • DIU aux progestatifs,
  • Implant progestatif
  • DIU au cuivre (sans hormones)
  • Diaphragme ou cape cervicale (sans hormones)

Ces méthodes ne contiennent pas d'œstrogènes et sont envisageables peu importe l'âge ou le niveau de sévérité du tabagisme. Enfin, les patchs ou anneaux vaginaux contiennent des œstrogènes qui, associés au tabac, présentent les mêmes effets sur les risques veineux et artériels que les pilules combinées. Dans tous les cas, demandez conseil à votre médecin ou gynécologue. 

Associations possibles ou contre-indiquées
Association Possible ou contre-indiquée ?
Tabac + pilule oestro-progestative Contre-indiquée
Tabac + pilule progestative Possible
Tabac + DIU hormonal Possible
Tabac + DIU au cuivre Possible
Tabac + implant Possible
Tabac + patch Contre-indiquée
Tabac + anneau vaginal Contre-indiquée
Tabac + cape ou diaphragme Possible
Tabac + préservatif Possible

Merci au Professeur Nicolas Meneveau, cardiologue à Besançon.