Pour être autorisé à pratiquer une quelconque médecine
dans l'hexagone, il faut être diplômé de la faculté
de médecine. Plutôt rassurant à première vue.
Sauf que la médecine chinoise n'est pas reconnue en tant que
telle et que ceux qui la pratiquent sont rarement diplômés de
médecine. "En quelque sorte, nous pratiquons donc dans l'illégalité",
souligne Philippe Sionneau.
S'ensuivent une série de conséquences qui contribuent à
rendre la pratique de la médecine chinoise relativement aléatoire
dans l'hexagone : "Il n'y a pas de reconnaissance du diplôme et
donc pas d'écoles agréées pour les non médecins
ou quoi que ce soit de ce genre. C'est donc difficile pour le novice, et
même pour nous, de s'y retrouver", regrette Philippe Sionneau.
Difficile même, de déterminer le nombre de praticiens. "Je
dirais quelques centaines au grand maximum. En revanche, il y a plusieurs
milliers d'acupuncteurs à travers le pays."
Vient alors le moment de choisir celui entre les mains duquel nous allons
remettre nos problèmes de santé. Là encore, le côté
amateur, qui peut avoir ses avantages dans d'autres circonstances, pose problème.
"Il est clair que c'est particulièrement difficile de s'y retrouver,
confirme Philippe Sionneau. Je reçois moi-même beaucoup de demandes
de patients qui cherchent à qui s'adresser dans une région
particulière. J'ai donc mis en place avec des confrères, via
un site internet, un annuaire de praticiens que nous considérons
sérieux. Nous avons pris en compte plusieurs critères comme,
entre autres, le fait qu'ils soient inscrits à l'Urssaf, ce qui signifie
donc qu'ils ont une activité déclarée, leur diplôme
d'une école reconnue par la médecine chinoise (qui garantit
un minimum d'heures de formations) et le fait de disposer d'un local spécialement
destiné aux consultations. Attention, cela ne veut pas dire que ce
sont des praticiens de référence, mais disons qu'ils offrent
un minimum de garanties, à mon avis indispensables. Au total, cet
annuaire recense aujourd'hui 120 médecins traditionnels chinois
dans toute la France. Ce n'est qu'un début."
Une médecine reconnue en occident
Mais alors, à quand une reconnaissance du diplôme de médecine
chinoise en France ? "Ce serait l'idéal, répond Philippe
Sionneau. Mais les praticiens sont encore assez mal organisés. Plusieurs
associations uvrent chacune de leur côté mais il n'y a
pas vraiment de cohérence entre les différentes actions. Pour
avoir un véritable pouvoir, il faudrait vraiment faire du lobbying
et nous ne sommes pas encore prêts."
Pourtant, la reconnaissance est déjà chose faite dans de
nombreux pays occidentaux, en Amérique du Nord et en Europe. "Il
est d'autant plus paradoxal que ce ne soit pas encore le cas en France alors
que nous sommes le pays d'Europe qui consulte le plus de médecins
alternatifs", souligne Philippe Sionneau.
En fait, de nombreux organismes officiels appellent déjà
à la reconnaissance des médecines traditionnelles. C'est notamment
le cas de l'Organisation mondiale de la santé, qui appelle depuis
2002 à la reconnaissance et au développement des systèmes
de santé traditionnels, dont la médecine chinoise. Le Parlement
européen a lui-même édicté une résolution
du même type encore plus tôt, en 1997, appelant les gouvernements
à s'ouvrir à la médecine non-conventionnelle. Mais aucune
de ces résolutions n'a bien sûr de caractère obligatoire.