Dr Juvanon : "L'amygdalectomie en ambulatoire n'est pas toujours possible"

L'ablation des amygdales est un grand classique de la chirurgie. Sans être une opération dangereuse, elle ne peut pas être systématiquement réalisée en ambulatoire, rappelle le Dr Jean-Marc Juvanon, spécialiste ORL.

Pourquoi la Société française des oto-rhino-laryngologistes (SFORL) rappelle-t-elle aujourd'hui que l'ablation des amygdales nécessite un bon suivi postopératoire ?

Dr Juvanon : Depuis quelques semaines, les Agences régionales de l'hospitalisation (ARF) incitent fortement les chirurgiens à pratiquer cette chirurgie en ambulatoire, c'est-à-dire que le patient ressort le jour même de l'intervention.

"Qui sera responsable si le patient ressort trop tôt et qu'il y a un problème?"

Cela pose un double problème. De santé, en premier lieu. Il y a un petit risque d'hémorragie dans les premières heures après l'intervention. En outre, la douleur peut être assez vive dans les 24 heures qui suivent l'opération. La personne (et le plus souvent, il s'agit d'enfants) ne peut alors pas se réalimenter toute seule et a besoin d'une perfusion pendant 24 heures. Ce qui ne serait pas possible en ambulatoire.

Problème administratif également puisque dans les hôpitaux où cette politique a été instaurée, le médecin doit demander une autorisation à la caisse s'il souhaite hospitaliser le patient, ce qui n'était pas le cas avant. Elle peut lui être refusée. Une opération toute simple auparavant devient donc relativement compliquée.

Nous ne somme pas opposés à la chirurgie en ambulatoire, mais elle ne doit pas devenir systématique.


Comment expliquez-vous qu'une telle décision ait été prise si les risques existent ?

Les sociétés savantes telles que la SFORL n'ont pas été consultées. Il devrait pourtant y avoir des études de faites pour que le cadre soit bien défini.

J'ai l'impression que les décisionnaires mettent sur un même plan l'opération des amygdales et l'opération des végétations. Cela n'a pourtant rien à voir, la première est plus lourde que la seconde, qui se pratique effectivement en ambulatoire depuis des années. La question, c'est : qui sera responsable si jamais le patient ressort trop tôt et qu'il y a un problème ?  

Dans l'imaginaire collectif, l'ablation des amygdales est une épreuve difficile et douloureuse. En quoi consiste-t-elle aujourd'hui ?

Avant toute chose, précisons que l'opération d'aujourd'hui n'a absolument rien à voir avec celle d'il y a 30 ou 40 ans. Il est vrai qu'à l'époque, cela pouvait se faire pratiquement à domicile et sans anesthésie.

Aujourd'hui, c'est évidemment beaucoup plus encadré et, surtout, l'opération est réalisée sous anesthésie générale. Cela dure une quinzaine de minutes. Mais même si le patient reçoit des antidouleurs au réveil, cela reste une opération très douloureuse. La zone d'ablation, soit 2 à 3 cm2, au fond de la gorge, est à vif. C'est pourquoi certaines personnes ont du mal à se réalimenter pendant quelque temps.


Pour quelles raisons peut-on procéder à l'ablation des amygdales ?

Deux causes majeures d'ablation existent. Elle peut être pratiquée lorsque les amygdales sont dites obstructives, c'est-à-dire qu'elles sont très grosses et provoquent des problèmes de respiration, la nuit notamment : le patient peut ronfler ou même s'étouffer. Pour ces patients, au moment de l'opération, il faudra évidemment une surveillance particulière lors de la première nuit. D'où l'intérêt d'une hospitalisation.

La seconde raison, ce sont les infections à répétition des amygdales.

 
Il semble que l'amygdalectomie soit moins pratiquée qu'il y a quelques années. Pourquoi ?

Effectivement, le nombre d'interventions a diminué, principalement grâce aux antibiotiques. Ils permettent d'enrayer les infections, évitant ainsi l'opération.